Sous-traitance : le champ d'application de la loi de 1975

Texte fondamental pour la protection des sous-traitants, la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 concerne tous les acteurs et partenaires de l'acte de construire : maîtres d'ouvrage, maîtres d'oeuvre, comptables publics, entreprises, banquiers, etc. Rappel des principes.
11:0007/12/2016
Rédigé par FFB Nationale
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Batiment Actualité Numéro 20 | Décembre 2016

Définition bâtiment : qu'est-ce que la sous-traitance ?

La loi définit la sous-traitance comme l'opération par laquelle un entrepreneur, appelé entrepreneur principal, confie sous sa responsabilité à un autre entrepreneur, appelé sous-traitant, l'exécution :

  • de tout ou partie du marché privé?;
  • ou d'une partie du marché public conclu avec le maître de l'ouvrage.

La sous-traitance visée par la loi implique donc l'intervention de trois personnes et la conclusion consécutive d'au moins deux contrats d'entreprise :

  • le marché principal conclu entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur principal?;
  • et le contrat de sous-traitance (appelé aussi « sous-traité ») conclu entre l'entrepreneur principal et le sous-traitant.

Le sous-traitant chargé de l'exécution d'une partie des travaux ne contracte qu'avec l'entrepreneur principal et pas avec le maître de l'ouvrage, ce qui distingue d'ailleurs la sous-traitance de la cotraitance.

Il est à noter que, dès son article 2, la loi a prévu la sous-traitance en chaîne : le sous-traitant qui sous-traite a, alors, qualité d'entrepreneur principal et assume toutes les obligations qui en découlent.

 

La loi est d'ordre public.

 

loi sous traitance

Est-il nécessaire d'intervenir sur le chantier pour être sous-traitant ?

NON. La définition légale implique seulement que le sous-traitant participe à l'exécution du contrat d'entreprise passé par le maître de l'ouvrage à l'entrepreneur principal. Un bureau d'études peut donc avoir qualité de sous-traitant au sens de la loi dès lors qu'il réalise des calculs ou des plans d'exécution qui engagent sa responsabilité vis-à-vis de l'entrepreneur principal 1.

 

En revanche, le fournisseur de matériaux n'est pas sous-traitant, car le contrat conclu avec l'entrepreneur est un contrat de vente, lequel n'entre pas dans le champ de la loi du 31 décembre 1975. Mais un fabricant peut avoir la qualité de sous-traitant s'il réalise un travail spécifique destiné à un chantier déterminé 2.

Le loueur de matériels et d'engins (grues) n'est pas un sous-traitant, car l'entrepreneur utilise librement la chose louée et l'affecte à l'exécution des travaux dont il ne se décharge pas.

Il en va de même pour le poseur d'échafaudage 3.

La sous-traitance de pose est-elle possible ?

OUI. La loi n'interdit pas à l'entrepreneur de sous-traiter la pose de matériaux mis à la disposition du sous-traitant. Mais les juges peuvent requalifier le contrat en contrat de travail si le sous-traitant exécute les travaux en situation de subordination juridique permanente 4.

 

Quand le sous-traitant emploie des salariés et les met à la disposition de l'entrepreneur principal, les juges peuvent constater un prêt illicite de main-d'œuvre et un délit de marchandage 5.

Afin d'éviter la requalification du contrat et les sanctions pénales et civiles qui en découlent, il convient de respecter le critère fondamental du contrat d'entreprise, à savoir l'indépendance du sous-traitant dans l'exécution des travaux. Cela implique notamment que le contrat comporte une tâche précise et une rémunération forfaitaire, et que le sous-traitant dirige lui-même ses salariés 6.

L'entrepreneur principal est-il tenu de déclarer son sous-traitant au maître de l'ouvrage ?

OUI. La loi du 31 décembre 1975 est d'ordre public. Elle impose à l'entrepreneur principal de faire accepter et agréer les conditions de paiement de son sous-traitant par le maître de l'ouvrage, ce qui permet au sous-traitant (de premier rang) de bénéficier du paiement direct dans les marchés publics. Les formalités d'acceptation et d'agrément s'imposent également dans les marchés privés, mais le formalisme est moins important et la règle du paiement direct ne s'applique pas (d'autres garanties sont prévues).

Si l'entrepreneur principal n'a pas fait accepter son sous-traitant, ni agréer ses conditions de paiement par le maître de l'ouvrage, l'entrepreneur principal est tenu envers le sous-traitant, mais il ne peut invoquer le contrat de sous-traitance à l'encontre du sous-traitant 7. Le sous-traitant dispose ainsi, pendant toute la durée du contrat, d'une faculté de résiliation unilatérale 8. Mais il est tenu de livrer exempts de vices et de malfaçons les ouvrages dont il a obtenu ou dont il réclame le paiement à l'entrepreneur principal 9.

Le fait de recourir à un sous-traitant sans le faire accepter par le maître de l'ouvrage est passible d'une amende de 7 500  €.

sous-traitant définitionL'entrepreneur principal doit-il vérifier la régularité du sous-traitant ?

OUI. Au-dessus de 5 000  €, le Code du travail oblige tout donneur d'ordre à vérifier que son cocontractant (sous-traitant) est immatriculé et emploie toute sa main-d'œuvre régulièrement.

 

L'entrepreneur principal doit se faire remettre par son sous-traitant un extrait K bis (registre du commerce) ou D1 (répertoire des métiers), ainsi qu'une attestation sécurisée délivrée par l'Urssaf.

Cette vérification s'effectue lors de la conclusion du contrat ou de l'envoi du bon de commande, puis tous les six mois jusqu'à la fin de l'exécution du contrat.

L'entrepreneur principal doit-il vérifier les cartes d'identification professionnelle du sous-traitant ?

OUI. Il pourra exiger la présentation de la carte BTP réalisée et délivrée par l'UCF 10.

L'entreprise principale doit-elle exiger des documents du sous-traitant étranger en cas de détachement ?

OUI. Pour lutter contre la concurrence sociale déloyale, tout donneur d'ordre qui contracte avec une entreprise étrangère doit se faire remettre, avant le début du détachement, les deux documents suivants :

  • copie de la déclaration de détachement adressée à l'unité territoriale de la DIRECCTE?;
  • copie du document désignant le représentant de l'entreprise en France chargé d'assurer la liaison avec les agents de contrôle pendant la durée du détachement des salariés.

Le donneur d'ordre est, selon le cas :

  • le maître d'ouvrage vis-à-vis de l'entreprise titulaire du marché?;
  • l'entreprise principale à l'égard de son sous-traitant?;
  • ou le sous-traitant vis-à-vis de son propre sous-traitant.

Le donneur d'ordre qui ne remplit pas son obligation de vigilance encourt une amende administrative de 2 000  € par salarié détaché, dans la limite de 500 000  €.

 

Ces vérifications s'ajoutent à celles prévues (voir plus haut) en matière de lutte contre le travail dissimulé et d'emploi d'étrangers sans titre, à effectuer à la conclusion du contrat et tous les six mois pour tout contrat d'une valeur au moins égale à 5 000  € HT.

Nous traiterons du droit et des bonnes pratiques en sous-traitance sur plusieurs numéros consécutifs.

 

À venir, le paiement direct du sous-traitant direct dans les marchés publics.

Deux modèles d'attestations

Le modèle 1 est applicable dans le cadre du marché principal conclu avec un maître d'ouvrage soumis au décret n° 8016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics (État, collectivités territoriales, établissements publics, OPHLM, S.A. d'HLM, SEM, entreprises publiques).

 

Le modèle 2 est à utiliser dans le cadre principal conclu par l'entrepreneur avec un maître d'ouvrage privé (promoteur, industriel, commercant, particulier).

 

1 - Cass. civ. 3e, 28 février 1984 ; C.A. Paris, 5 mai 2000.
2 Exemples : armatures métalliques, Cass. civ. 3e, 5 fév. 1985 ; panneaux de façades en béton, C.A. Paris, 1er oct. 1993.
3 Exemples : location de grues, Cass. com., 12 mars 1991 ; location de nacelles élévatrices, T.A. Rouen, 19 juin 2000 ; location d'échafaudages, Cass. civ. 3e, 23 janvier 2002.
4 Art. L. 8221-6 du Code du travail.
5 Art. L. 8241-1 et L. 8231-1 du Code du travail.
6 Bâtiment actualité n° 4 du 10 mars 2015.
7 Art. 3 de la loi du 31 décembre 1975.
8 Cass. civ. 3e, 24 avril 2003.
9 Cass. civ. 3e, 13 avril 1988.
10 Cf. Bâtiment actualité n° 19 du 23 novembre 2016.

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