Comment manager ces jeunes ?

Comme toutes les jeunes générations, les Y et les Z concentrent sur eux une série de critiques, voire de préjugés, sur leurs comportements, leurs attitudes et leurs valeurs, qui ne seraient pas toujours adaptés aux exigences du monde du travail d'aujourd'hui. Certes, ils bousculent les habitudes, mais ils sont ce que nous en avons fait, ils sont notre avenir. Sans tomber dans le piège de la généralisation, nous sommes face à de grandes évolutions, qui nous invitent à être seulement plus curieux de l'autre. Alors, apprenons à nous comprendre, à dialoguer et à tirer profit de cette rencontre intergénérationnelle !
11:0024/05/2017
Rédigé par FFB Nationale
revue
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Batiment Actualité Numéro 9 | Mai 2017

 

PROPOS DE

Pierre Drelon

Économiste et sociologue, intervenant et conférencier pour la FFB.

 

 

 

 

 

Les Y sont nés après 1980. Ils sont massivement entrés sur le marché du travail en France depuis près de 15 ans, bousculant de nombreux codes. Génération en quête de sens, on les appelle la génération du « pour quoi ? ».

Les Z sont nés à partir de 1995, on les appelle aussi génération numérique... et ils commencent à arriver sur le marché du travail.

 

Chaque génération vit selon des codes différents, et il est fréquent d'entendre les seniors critiquer les attitudes des nouvelles générations en se plaignant de leur désinvolture au travail.

 

Travailler avec ces jeunes générations est une sacrée remise en question, avec de belles occasions de progrès partagés.

 

Il y a trois enjeux qui justifient que l'on s'intéresse à la manière de manager ces générations :

  • il existe une certaine fracture entre les attentes de ces génération et le fonctionnement actuel des organisations. C'est pourquoi les managers doivent comprendre leur fonctionnement pour mieux répondre à leurs attentes?;
  • préparer les organisations à leur culture. En effet, dès 2020, la génération Y sera la plus nombreuse au travail. Si l'on pouvait encore s'attendre à ce que les Y entrent dans le cadre de l'organisation, les Z seront en rupture culturelle complète si l'on ne prend pas garde aujourd'hui de préparer leur place demain?;
  • développer des synergies intergénérationnelles.

Qui sont ces jeunes ?

C'est la génération de l'expérience, du test, du « tout est possible » (il suffit d'y penser et de le faire), de l'erreur intégrée (si ça ne marche pas, on passe à autre chose), du défi, du choix de la vie qu'on a envie de vivre.

 

Ils ont surdéveloppé leur capacité de réaction rapide, intuitive, tactile, sollicitée par les écrans. En revanche, ils sous-investissent spontanément les modes de pensée plus structurés, logiques, nécessitant analyse, réflexion et temps.Ils sont débrouillards, autodidactes, entrepreneurs, intuitifs, créatifs, pragmatiques.

Exit l'inutile, place à l'essentiel. Ils vont vite. Ils ont besoin d'aimer ce qu'ils font, sinon ils ne s'engagent pas. La routine leur fait horreur, le changement et la prise de risque sont inhérents à leur conception de la vie professionnelle.

Ils peuvent s'investir s'ils sont passionnés et responsables de la mission qui leur est confiée. Et pour cela, il n'est pas rare que leur travail investisse leur vie privée sur des horaires décloisonnés, tout comme il est pour eux normal que leur vie privée investisse leur temps au travail. Impossible de les priver des technologies et des réseaux sociaux au travail. Ils sont exigeants sur le savoir-être et le respect qu'ils ressentiront dans leur entreprise. S'ils se sentent trahis, ils n'auront aucune fidélité à la structure et partiront sur-le-champ.

En quête de sens

Ces nouvelles générations sont avides de sens. Peut-être encore plus que leurs aînés. Ces jeunes ont besoin de comprendre exactement leur mission et la raison de leur travail.

Leur supérieur hiérarchique ne peut plus se contenter de donner des ordres sans les justifier, il doit s'attendre à se heurter à de fréquentes demandes d'explications. Les jeunes n'acceptent de suivre les directives qu'à condition d'en comprendre l'intérêt.

Émotionnels

De manière paradoxale, les Y sont en déficit émotionnel. Aussi sont-ils de manière inconsciente à la recherche de contacts humains authentiques et sans écran.

Ils recherchent des relations plus personnelles avec leurs managers, sur lesquels ils veulent s'appuyer pour progresser.

L'autorité s'incarne dans le comportement de leurs managers et le leadership dont ils vont savoir faire preuve ou pas.

Ils ont besoin de vivre intensément leur vie professionnelle (dans du plaisir, des actions communes, des défis, de la solidarité...), veulent sentir qu'ils appartiennent à une communauté, qu'ils existent et sont respectés par les autres collaborateurs et surtout leur hiérarchie.

Autonomes

Ils apprécient la liberté et redoutent plus que tout d'être surveillés et contrôlés en permanence.

Ils souhaitent être autonomes dans le choix des moyens, les horaires de travail, l'organisation et l'enchaînement des tâches, avec en point de mire les résultats demandés.

Zappeurs

Motivation fluctuante, besoin d'évoluer rapidement, de changer fréquemment d'activité, de poste ou de secteur, ils supportent difficilement la stabilité, mais s'adaptent facilement.

Ils ont besoin d'aller rapidement à l'essentiel, d'accéder à toutes les sources d'information.

Ils ont peur de s'ennuyer, peur de la lassitude, soif de tout intégrer ou d'apprendre un maximum, mais avec un maximum de plaisir et de facilité, même si cela peut paraître paradoxal.

Participatifs

Ils sont toujours prêts à communiquer, ils recherchent le dialogue et sont aussi proactifs.

La définition de leurs objectifs, des règles en entreprise et des méthodes de travail passe beaucoup par les échanges, jamais par le formalisme de l'écrit, qu'ils rejettent automatiquement.

Exigeants

Conscients de leur valeur et de leurs droits, ces jeunes s'arrêtent parfois sur des détails lors d'un recrutement ou d'une période d'intense activité.

Dans certains cas, ils surestiment leurs compétences.

Ils ne sont pas prêts à tous les sacrifices pour leur travail, ni même pour leur carrière.

Ils se refusent à se laisser contrôler par qui ou quoi que ce soit. Ils veulent rester libres de saisir toutes les opportunités.

High-tech

Ils maîtrisent rapidement tous les outils modernes, du Web collaboratif aux réseaux sociaux, des smartphones aux derniers progiciels. Les digital natives sont hyperconnectés !

Vie personnelle

La vie professionnelle doit être stimulante, mais aussi laisser du temps pour la construction d'une vie personnelle.

Le temps de carrière chronophage est révolu, le développement personnel devient une aspiration forte des Y et des Z.

Quelle attitude adopter pour les motiver ?

Donner du sens

Donner du sens, cela passe notamment par :

  • définir les enjeux du poste, du projet ou de la mission?;
  • dire les valeurs qui vont soutenir le travail?;
  • expliciter en quoi cela contribue à quelque chose de plus grand.

Donner le sens à une personne répond à cette question fondamentale, « pour quoi ? » (en deux mots).Le modèle de management doit donc être structural, éducatif et psychologique.

Donner un cadre puis laisser agir

On entend souvent dire que ces jeunes générations Y et Z remettent en cause l'autorité.

Souvent, derrière cela, il y a un besoin non exprimé : celui d'avoir une structure solide de travail et de se sentir sécurisé par un cadre. Le cadre doit être explicité et partagé.

Il convient alors de :

  • définir les objectifs du poste, du projet ou de la mission?;
  • clarifier les rôles?;
  • expliciter les attentes du manager et du salarié?;
  • indiquer les personnes ressources à contacter?;
  • donner accès aux outils disponibles?;
  • dire ce qu'il est interdit et permis de faire dans ce cadre.

L'autonomie est une valeur importante pour ces nouvelles générations. C'est pourquoi, une fois le cadre clairement posé et compris, le manager doit « lâcher prise » et laisser agir le jeune.

Manager en responsable ressource plutôt qu'en donneur d'ordre

Les générations Y et Z ne veulent plus d'un responsable dont le rôle s'arrête à distribuer les ordres et les tâches (posture de donneur d'ordre). Elles veulent un responsable qui leur donne avant tout les ressources nécessaires à leur travail (posture de responsable ressource).

En tant que manager, pour évoluer vers une posture de responsable ressource, vous devez :

  • être à l'écoute des attentes et besoins des membres de votre équipe?;
  • donner du feedback immédiat?;
  • faire confiance aux capacités de votre équipe à réussir?;
  • encourager la coopération entre les membres de votre équipe?;
  • vous assurer que les ressources nécessaires sont mises à disposition?;
  • utiliser le silence comme un allié, laisser la parole au jeune.

En adoptant une posture managériale de responsable ressource, vous générez de l'autonomie pour ces générations.

L'entreprise pourra alors tirer profit des performances individuelles pour être performante elle-même.

Investir dans la relation

La communication des générations Y et Z est directe.

Sur les réseaux sociaux, le digital native a l'habitude d'exprimer son opinion. Il y a une parité entre les individus sur Internet, ce qui rend les échanges rapides et sans détour. Ces jeunes s'attendent donc à pouvoir communiquer souvent, simplement et directement avec leur hiérarchie. Ils veulent une relation proche et informelle avec leur manager. Dialoguez plus souvent qu'une fois par an, l'entretien d'évaluation annuel est largement insuffisant !

En tant que manager, vous devez bâtir avec eux une relation de confiance.

Ils ont envie d'entreprendre et veulent des enjeux, des défis, des aventures, des perspectives et des alternatives, de la proximité avec des contacts directs, du partage d'expérience, des signes de reconnaissance, de l'apprentissage tout le temps... et des moments conviviaux !

 

Osez la confiance, donnez-leur du sens, des repères, un cadre (et du recadrage)... Les règles du jeu ou le « je » s'exprime.

À RETENIR...
  • Comprenez en quoi ils sont différents de leurs aînés. Adaptez le discours : plus direct, plus concret, plus pragmatique.
  • Adoptez un management plus transversal. Restez ouvert en recherchant dans vos pratiques ce qui relève de l'habitude ou du cœur du métier, pour les faire évoluer.
  • Suscitez l'envie de devenir tuteur ou mentor volontaire et formé. Ni parent, ni prof, mais pro : l'instinct ne suffit pas.
  • Donnez-leur du « vrai » travail, dans un temps normal, en les accompagnant à une distance raisonnable. Cadrez-les, en leur laissant une autonomie.
  • Débriefez immédiatement. Évaluez. Donnez des axes de progression à court terme.
  • Tenez compte de leurs remarques, même candides : elles vous apportent un regard extérieur, frais, sur vos pratiques et peuvent donc être source d'innovation.
  • Montrez-vous fédérateur, juste et transparent.
  • Horizontalement autant que verticalement, un Y veut évoluer : enrichir ses compétences et sa vision de l'entreprise lui permet de progresser. Tenez-le donc au courant de vos projets, incluez-le... À défaut, vous risqueriez de le perdre.
  • Sachez qu'un Y et plus encore un Z sont toujours à la recherche d'accomplissement personnel. Ils ne peuvent se résoudre à s'ennuyer.

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