Refus illégal de permis de construire : le juge peut imposer à l'Administration de délivrer le permis

Après avoir annulé un arrêté de refus de permis de construire, le juge doit (sauf exceptions) imposer à l'Administration de délivrer ledit permis. C'est ce que vient d'affirmer le Conseil d'État. Voilà une décision qui devrait inciter les maîtres d'ouvrage à contester les refus de permis infondés, pour débloquer leurs projets.
11:0003/10/2018
Rédigé par FFB Nationale
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Batiment Actualité Numéro 16 | Octobre 2018

Le Conseil d'État vient de rendre un avis très important, en réponse à une question posée par un tribunal administratif qui s'interrogeait sur les suites à donner à une annulation de refus de permis.

La question était la suivante : le juge administratif doit-il, après avoir annulé un arrêté de refus de permis de construire, imposer à l'Administration d'accorder ce permis??

Trois articles du Code de l'urbanisme pour étayer la décision du Conseil d'État

Le Conseil d'État a répondu positivement 1, en faisant une application combinée de trois articles du Code de l'urbanisme.

Premier article

Lorsque l'Administration rejette une demande de permis, elle doit motiver sa demande.

Cette motivation doit indiquer tous les motifs justifiant la décision de rejet (non-respect des règles de hauteur, d'implantation, de destination, de création de parkings...) 2.

Cette disposition créée en 2015 3 a pour but de combattre les manœuvres dilatoires de certains services instructeurs, qui sortaient au compte-gouttes de nouveaux motifs de refus, à l'occasion de refus successifs.

Deuxième article

Lorsque le juge administratif statue sur la légalité d'un refus de permis, il doit se prononcer sur tous les motifs de refus opposés par l'Administration (dans l'arrêté de refus ou en cours d'instance) 4.

Troisième article

Lorsqu'un refus de permis a été annulé, le pétitionnaire peut confirmer sa demande de permis (sous six mois). Cette nouvelle demande de permis doit être instruite au vu des règles d'urbanisme en vigueur à la date de l'arrêté de refus annulé 5. Le permis ne peut donc pas être refusé en application de nouvelles règles d'urbanisme.

 

Ainsi, en cas d'annulation d'un refus de permis, l'Administration ne peut en principe plus refuser à nouveau le projet.

C'est ce qui a permis au Conseil d'État d'affirmer que le juge administratif, après avoir censuré tous les motifs invoqués par l'Administration pour annuler le permis, doit lui ordonner de délivrer le permis illégalement refusé.

Jusqu'à présent, après avoir annulé un refus de permis, le juge administratif imposait uniquement à l'Administration de statuer à nouveau sur la demande, si le pétitionnaire le demandait.

Attention, le pétitionnaire qui attaque un refus de permis doit expressément demander au juge de prononcer l'injonction de délivrer le permis.

Caractéristiques du permis délivré après injonction

Le permis délivré par l'Administration, après injonction du juge, n'aura pas un caractère définitif.

Il peut, comme tout permis, faire l'objet d'un recours de la part des tiers dans les deux mois suivant l'affichage du permis sur le terrain.

Cela paraît absurde, car si le refus était illégal, c'est que le projet était conforme aux règles d'urbanisme.

 

L'Administration pourrait aussi contester l'injonction et obtenir son annulation par une cour administrative d'appel ou par le Conseil d'État.

Si l'injonction est annulée après que l'Administration a délivré le permis, elle peut le retirer dans les trois mois suivant la notification de la décision de la cour administrative d'appel ou du Conseil d'État.

La FFB applaudit cetteprise de position duConseil d’État et appelleles maîtres d’ouvrageà se saisir de ce dispositifpour accélérer la miseen oeuvre de leurs projetsde construction.

Deux exceptions

Le Conseil d'État relève toutefois deux cas où le juge ne doit pas ordonner la délivrance du permis :

  • lorsque la demande de permis est illégale pour un motif non relevé par l'Administration, mais que le juge a identifié?;
  • lorsqu'un changement de circonstances est relevé à la date du jugement (par exemple, un nouveau risque naturel identifié, rendant le terrain inconstructible).
1

Avis du Conseil d'État, 25 mai 2018, n° 417350.

2

Article L. 424-3 C. urb.

3

Loi n° 2015-990, 6 août 2015,JO du 7 août 2015 (dite loi Macron).

4

Article L. 600-4-1 C. urb.

5

Article L. 600-2 C. urb.

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