Situations avant réception : le paiement à 100 %, c’est possible !

Certains maîtres d’ouvrage publics et comptables publics demandent aux entreprises d’établir une dernière situation à 90 %, 92 % du montant des travaux, refusant une dernière situation à 100 %, sous le prétexte que la réception des travaux n’est pas prononcée. C’est une pratique abusive : vous êtes en droit de réclamer le paiement à 100 % de vos travaux. La réglementation est très claire en la matière.
11:0028/04/2021
Rédigé par FFB Nationale
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Batiment Actualité Numéro 8 | Avril 2021

Réglementation applicable au paiement des situations mensuelles

L’article R. 2192-12 du Code de la commande publique fixe le point de départ du délai global de paiement, en marchés publics, à la date de réception de la demande de paiement par le maître d’ouvrage ou, si le marché le prévoit, par le maître d’œuvre.

Lorsque la date de réception de la demande de paiement est incertaine ou antérieure à la date d’exécution des prestations, le délai de paiement court à compter de la date d’exécution des prestations 1.

 

Décompte mensuel

Le CCAG-Travaux de 2021 (tout comme son prédécesseur) organise la procédure de paiement des situations mensuelles.

Il indique qu’avant la fin de chaque mois, le titulaire remet sa demande de paiement mensuelle au maître d’œuvre, sous la forme d’un projet de décompte 2. Ce projet comporte le montant total des sommes auxquelles l’entrepreneur peut prétendre du fait de l’exécution du marché depuis son début.

 

Réglementation applicable au paiement des situations mensuelles

L’article R. 2192-12 du Code de la commande publique fixe le point de départ du délai global de paiement, en marchés publics, à la date de réception de la demande de paiement par le maître d’ouvrage ou, si le marché le prévoit, par le maître d’œuvre.

Lorsque la date de réception de la demande de paiement est incertaine ou antérieure à la date d’exécution des prestations, le délai de paiement court à compter de la date d’exécution des prestations 1.

 

Décompte mensuel

Le CCAG-Travaux de 2021 (tout comme son prédécesseur) organise la procédure de paiement des situations mensuelles.

Il indique qu’avant la fin de chaque mois, le titulaire remet sa demande de paiement mensuelle au maître d’œuvre, sous la forme d’un projet de décompte 2. Ce projet comporte le montant total des sommes auxquelles l’entrepreneur peut prétendre du fait de l’exécution du marché depuis son début.

Ce montant est établi à partir des prix initiaux du marché, sans actualisation ni révision des prix et hors TVA.

Le projet de décompte mensuel constitue la demande de paiement, qui doit :

  • être datée et mentionner les références du marché ;
  • être envoyée au maître d’œuvre par tout moyen permettant de donner une date certaine et de calculer les délais de paiement et, le cas échéant, de payer les intérêts moratoires.

Le maître d’œuvre accepte ou rectifie le projet de décompte mensuel établi par le titulaire, qui devient alors le décompte mensuel.

En conséquence, il ne peut pas demander aux entreprises de refaire leur situation.

Au prochain numéro : nouveau CCAG-Travaux

Le nouveau CCAG-Travaux est entré en vigueur le 1er avril. Il est applicable aux marchés pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence envoyé à la publication à compter de cette date.

 

Acompte mensuel

À partir du décompte mensuel, le maître d’œuvre détermine le montant de l’acompte mensuel à régler au titulaire 2.

Il dresse à cet effet un état d’acompte mensuel comprenant le montant de l’acompte mensuel, la TVA, les pénalités, l’actualisation ou la révision des prix, le montant de l’avance, la retenue de garantie, etc.

Le maître d’œuvre notifie par ordre de service au titulaire l’état d’acompte mensuel et propose au maître d’ouvrage de régler les sommes qu’il admet 3.

Cette notification intervient dans les sept jours à compter de la date de réception de la demande de paiement mensuelle du titulaire.

Cette mesure fixe au maître d’œuvre un délai strict, désormais connu des entrepreneurs (sept jours), pour établir l’état d’acompte qui permet de déclencher le paiement du titulaire.

Si cette notification n’intervient pas dans un délai de sept jours à compter de la réception de la demande du titulaire, celui-ci en informe le maître d’ouvrage, qui procède au paiement sur la base des sommes qu’il admet.

Ce point qui figure dans le CCAG-Travaux permet de ne pas attendre la décision du maître d’œuvre et d’être payé en cas de carence de ce dernier.

 

Délai global de paiement

Les articles R. 2192-10 et R. 2192-11 du Code de la commande publique fixent le délai légal de paiement applicable à chaque type d’acheteur. Celui-ci ne peut excéder :

  • 30 jours pour l’État et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial, pour les collectivités territoriales et les établissements publics locaux, et pour certaines personnes morales de droit privé 4 (sociétés d’économie mixte locales, sociétés publiques locales, sociétés publiques locales, par exemple) ;
  • 50 jours pour les établissements publics de santé et les établissements du service de santé des armées ;
  • 60 jours pour les maîtres d’ouvrage tels les S.A. HLM 5, à l’exception de celles ayant la nature d’établissements publics locaux.

Dans un contexte économique difficile, payer les acomptes à 100 % est une nécessité pour les entreprises.

Attention

Les entreprises publiques qui sont des établissements publics locaux, comme les offices publics de l’habitat (OPH), ont un délai de paiement maximal de 30 jours.

Le délai global de paiement expire à la date du règlement par le comptable public, ce qui implique que cette date est celle où ce dernier effectue les formalités nécessaires pour permettre le virement des sommes ainsi dues sur le compte de l’entreprise.

Les documents contractuels peuvent prévoir des délais de paiement spécifiques dans la limite du délai global maximal de paiement applicable au maître de l’ouvrage concerné.

Le guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics 6 rappelle que « toute clause stipulant un délai supérieur [de paiement] serait nulle ».

En cas de désaccord entre l’entrepreneur et le maître de l’ouvrage sur le montant d’un acompte, le mandatement est effectué sur la base provisoire des sommes admises par ce dernier.

Lorsque les sommes ainsi payées sont inférieures à celles finalement dues à l’entrepreneur, celui-ci a droit à des intérêts moratoires calculés sur la différence 7.

Pour les marchés des collectivités territoriales, le mandatement effectué en l’absence de fonds disponibles pour le paiement des prestations est assimilable au défaut de mandatement et ouvre droit à des intérêts moratoires.

Enfin, les règlements d’acompte n’ont pas le caractère de paiement définitif et ne lient pas les parties 8.

L’entrepreneur est débiteur des acomptes jusqu’au règlement final du marché.

L'attitude d’un maître d'ouvrage public refusant le paiement à 100 % est critiquable et illégale.

 

Le paiement à 100 % des situations mensuelles

Le maître d’ouvrage public est en droit de retenir au maximum 5 % du montant du marché, dès lors que les dispositions contractuelles prévoient une retenue de garantie 9.

Mais si l’entrepreneur a remplacé cette retenue de garantie par une caution personnelle et solidaire 10 (si le maître d’ouvrage ne s’y oppose pas), ou par une garantie à première demande, le refus de payer les entreprises à 100 % est contraire au Code de la commande publique et à la réglementation (sauf, bien sûr, si les documents du marché prévoient d’autres retenues, pour la remise des DIUO ou DOE, par exemple).

Un entrepreneur peut, dans cette hypothèse, exiger le paiement de la totalité des sommes qui lui sont dues lors de la production de la dernière situation mensuelle.

Cette affirmation est corroborée par plusieurs textes qui rappellent que le Code de la commande publique et le CCAG-Travaux n’interdisent pas à un maître d’ouvrage public de régler par acomptes successifs la totalité ou la quasi-totalité du montant d’un marché au fur et à mesure de son exécution.

Dans ce cas, le comptable public n’est pas fondé à suspendre le paiement du dernier acompte périodique et le solde peut être nul. L’attitude d’un maître d’ouvrage public refusant le paiement à 100 % est critiquable et illégale.

Aux garanties souscrites au titre du marché ne peut s’ajouter une garantie supplémentaire sous la forme d’une retenue de 5 %, ce qui conduirait à un dépassement du taux maximal de la retenue de garantie, qui est fixé impérativement à 5 % par l’article R. 2191-33 du Code de la commande publique.

En pratique, certaines dispositions contractuelles, figurant dans le CCAP, prévoient que le paiement ne sera pas effectué à 100 % avant la réception des travaux.

À cette disposition doit être opposée au maître d’ouvrage public, par les entreprises, une réponse de l’ex-Commission centrale des marchés : « Les dispositions du Code des marchés publics [désormais Code de la commande publique] [...] sont obligatoires et s’imposent aux cocontractants des marchés publics sans qu’il soit besoin de rechercher si elles ont ou non un caractère d’ordre public. Toute stipulation d’un marché qui contreviendrait aux prescriptions du Code des marchés publics serait entachée d’irrégularité et serait donc de nature à vicier les marchés qui méconnaissent ces prescriptions 11. »

Aussi, la direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie a pu préciser que « l’acheteur ne peut, sans méconnaître l’article R. 2191-34 du Code de la commande publique, retenir au titre de la retenue de garantie une somme représentant plus de 5 % du montant initial du marché public augmenté, le cas échéant, du montant des modifications du marché public en cours d’exécution.

À titre d’exemple, un acheteur ne peut pas prévoir que le montant total des acomptes ne pourra excéder 85 % du montant du marché public dès lors qu’un tel plafond aboutit à retenir une somme supérieure à 5 % du montant du marché public 12 ».

Les entreprises doivent produire ces textes auprès des maîtres d’œuvre, maîtres d’ouvrage et trésoreries qui refuseraient de respecter la réglementation.

Quelques règles applicables 13 en matière de délais de paiement et de versement des avances

  • Obligation pour les maîtres d’ouvrage publics et les comptables publics de veiller au traitement rapide des paiements afférents aux marchés publics.
  • Importance de s’organiser avec le comptable public et de mettre en place un circuit des opérations administratives afférentes au règlement.
  • Possibilité de s’engager sur un délai plus court que le délai maximal réglementaire de 30 jours.
  • Obligation de payer des intérêts moratoires à l’entreprise ayant subi le retard, et ce, sans que l’entreprise ait à le demander.
  • Nécessité de procéder au mandatement des intérêts moratoires, dès lors que, le principal étant payé, la durée exacte du retard est constatée.
  1. Art. R. 2192-13 du Code de la commande publique.
  2. Art. 12.1.1 du CCAG-Travaux de 2021.
  3. Art. 12.2.2 du CCAG-Travaux de 2021.
  4. Celles qui remplissent les critères énoncés à l’article L. 1211-1 du Code de la commande publique (ex. : sociétés d’économie mixte locales, sociétés publiques locales…).
  5. Qui sont des entreprises publiques au sens du II de l’article 1er de l’ordonnance n° 2004-503 du 7 juin 2004 portant transposition de la directive 80/723/CEE relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques.
  6. Circulaire du 14 février 2012, art. 21.5.
  7. Art. R. 2192-348 du Code de la commande publique.
  8. Art. 12.2.3 du CCAG-Travaux de 2021.
  9. Art. L. 2191-711 du Code de la commande publique.
  10. Art. R. 2191-36 du Code de la commande publique.
  11. TMP n° 83, février 1984 ; réponse ministérielle du 17 octobre 1986, p. 24 ; TMP n° 141, novembre-décembre 1989.
  12. Fiche de la DAJ du ministère de l’Économie, « Les acomptes », mise à jourle 1er avril 2019.
  13. Instruction des ministres de l’Économie et de l’Équipement, 13 décembre 2005 - J.O. du 30 décembre 2005. Fiche du ministère de l’Économie sur « les acomptes » de février 2011. Guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics (circulaire du 14 février 2012, article 21.3). Article 12.1.1 du CCAG-Travaux 2021, qui n’exclut pas la dernière situation mensuelle.

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