2017 : accélération de la reprise dans le bâtiment
Pour le bâtiment, après huit années de crise et le retournement de 2016 à + 1,6 % en volume, la croissance s'est nettement renforcée en 2017. L'activité globale a ainsi progressé de 4,7 % hors effet prix.
L'activité accélère
C'est le logement qui constitue le principal vecteur de cette croissance, avec une production en hausse de 12,8 % en 2017. De fait, près de 410 000 logements auront été mis en chantier, soit un niveau 15 % au-dessus de la moyenne 1980-2016. Toutefois, c'est la confirmation de la reprise du non résidentiel neuf qui constitue la bonne nouvelle de 2017. [...] Quant au marché de l'amélioration-entretien, [...], il sort enfin de l'ornière, avec une croissance de 1,4 % de la production, hors effet prix. Il faut par ailleurs souligner que le redressement de l'activité irrigue progressivement le territoire, du moins hors outremers. [...]
L'emploi progresse
La principale conséquence de cette croissance affirmée se lit dans l'évolution de l'emploi, sensiblement meilleure que prévue. En moyenne annuelle, le solde net pour 2017 ressort à + 1,7 % ou 20 000 postes créés, [...] Les créations d'emplois pourraient être plus dynamiques, si les entreprises ne rencontraient pas des difficultés croissantes à recruter déclarées par les chefs d'entreprise, malgré un maintien à haut niveau du chômage. [...]
L'appareil de production reste fragile
Quant aux entreprises, leur bulletin de santé inquiète un peu moins aujourd'hui. En effet, pour la deuxième année consécutive, le nombre de défaillances chute. [...] Toutefois, l'appareil de production reste pénalisé par le peu d'effet de la croissance sur les prix. Certes, les prix de vente de l'immobilier progressent vivement depuis deux ans, de l'ordre de 4 % dans l'ancien et de 3 % dans le neuf. Ce n'est toutefois pas le cas des prix bâtiment, à peu près en ligne avec l'inflation, soit aux environs de 2 %. [...]
2018 : après avoir allumé le feu, ne pas l'étouffer...
La croissance pourrait se trouver handicapée à court terme par les obstacles introduits en loi de finances pour 2018.
Des menaces liées à la loi de finances pour 2018
L'assimilation de la détention d'immobilier à une rente conduit à stigmatiser la pierre, au travers de la transformation de l'Impôt sur la fortune (ISF) en Impôt sur la fortune immobilière (IFI) d'une part, à la non éligibilité des revenus locatifs au Prélèvement forfaitaire unique (PFU) d'autre part. La lutte contre le déficit public est passée dans un premier temps par une éviction totale et immédiate de la zone C pour le PTZ neuf, des zones B2 et C pour le « Pinel », avant que le président de la République annonce une révision moins brutale de ces dispositifs lors des dernières 24 heures du bâtiment. Pour faire bonne mesure, l'APL accession disparaitra dès le premier janvier 2018. La charge s'est poursuivie sur le CITE (Crédit d'impôt transition énergétique), avec l'exclusion des fenêtres, portes et volets, ainsi que des chaudières à fioul qui devait prendre effet le jour même de la publication du projet de loi de finances. Là encore, la mobilisation de
la FFB a permis d'éviter le choc brutal, mais il n'est que décalé dans le temps. Enfin, le monde HLM devra avaler une potion amère sous la forme d'un cocktail de baisse des loyers et de l'APL, ainsi qu'un relèvement de 5,5% à 10 % de taux de TVA s'appliquant aux chantiers en locatif social. Les marchés du logement se trouveront donc pénalisés en 2018 et au-delà, même s'il faut aussi signaler des avancées notables, comme la pérennisation pour quatre ans du Pinel et du PTZ en zones A et B1, ou bien encore le lancement du plan « Villes moyennes ».
En neuf, décélération du logement et accélération du non résidentiel
Ainsi, malgré la dynamique très forte des autorisations de logement en 2017, qui ressortent à + 13,3 %, les mises en chantier s'inscriront en légère baisse de 2,6 % en 2018, notamment sous l'effet d'un recul de 4,8 % de l'individuel, lié au recentrage du PTZ. [...] Au total, tous secteurs confondus, le nombre de logements commencés retombera donc un peu sous les 400 000 unités. Compte tenu des chantiers actuellement en cours, la production en logement neuf continuera de progresser en 2018, mais à un rythme trois fois moindre qu'en 2017, à 3,4 %. Quant au non résidentiel neuf, peu concerné par la régulation budgétaire actuelle, il poursuivra sa croissance en l'amplifiant. [...]
En amélioration-entretien, de fortes incertitudes
En revanche, le segment de l'amélioration-entretien souffrira d'un double handicap : d'une part, la suppression progressive des chaudières au fioul et des fenêtres du champ du CITE sur les marchés privés ; d'autre part, l'impact des prélèvements sur le monde HLM. En conséquence, malgré un nouvel essor des travaux sur le parc non résidentiel, le repli côté logement conduira à un net tassement du marché global de l'amélioration-entretien, [...] Cette partie du scénario reste d'ailleurs fragile. Il s'avère aujourd'hui difficile d'estimer l'impact de la transformation du CITE en prime début 2019, après les perturbations déjà intervenues en 2018. Les débats des derniers mois ont d'ores et déjà rendu moins lisible un dispositif pourtant conçu pour être facile à comprendre. Il faudra veiller à ce que la mise en place de la prime ne rende pas le sujet totalement opaque.
Tassement de la croissance, mais emploi bien orienté à court terme
En dépit d'un environnement macro-économique et financier très porteur, l'activité bâtiment verrait donc son rythme global de croissance divisé par deux, pour tomber à 2,4 % en 2018.
Compte tenu du décalage temporel entre évolutions de l'activité et de l'emploi, comme des difficultés de recrutement constatées aujourd'hui, les effectifs se maintiendraient en hausse en 2018, de 30 000 postes précisément, soit + 2,6 %. Il s'agit d'une bonne nouvelle pour l'économie nationale, le secteur restant l'un des rares employeurs répartis sur l'ensemble de territoire. Il constitue donc assurément un atout-maître sur lequel s'appuyer pour lutter contre la fracture territoriale.
2019 et après : ... mais entretenir la flamme
La reprise s'inscrit donc bien dans les cycles habituels de la construction, avec leur phase de croissance de quatre à cinq ans. Toutefois, les mesures prises en loi de finances pour 2018 pourraient faire capoter ce scénario. C'est le cas en particulier de deux mesures : l'instauration du Prêt à taux réduit (PTR) et le rabotage du CITE.
La FFB demande avec force le maintien du PTZ et défend un CITE à 15 % sur le remplacement des simples vitrages et des chaudières à fioul performantes jusqu'au 31 décembre 2018. à moyen terme, la FFB restera vigilante et fera entendre ses positions sur trois sujets au moins. Le premier concerne
la révision des zonages HLM et Pinel, attendue courant 2018. Les moyens informatiques et statistiques permettent aujourd'hui de construire des découpages à la fois plus fins et plus réactifs, au service de nos concitoyens et de notre économie. Il ne s'agit finalement que de se doter des moyens de répondre aux besoins des ménages et des entreprises, au travers d'une politique du logement mieux territorialisée. Le deuxième sujet a trait aux évolutions structurelles du secteur que le gouvernement souhaite introduire au travers de la
loi « évolution du logement, de l'aménagement et du numérique » (ELAN). Nous souhaitons qu'elle débouche au plus vite sur des éléments concrets en matière de simplification normative et règlementaire, de lutte efficace contre les recours abusifs, de meilleure organisation de la chaîne du logement grâce au numérique, etc. Le troisième sujet correspond aux projets de
Plan climat et de Plan de rénovation énergétique des bâtiments portés par Nicolas Hulot. Les enjeux pour notre secteur restent immenses. Nous les partageons et souhaitons pleinement participer aux efforts correspondants. Mais nous soulignons aussi que la multiplication des grands objectifs inatteignables depuis 2008 se traduit par une forme de lassitude, chez nos clients comme au sein de nos entreprises. Surtout lorsque, faute de tenir la trajectoire attendue (en matière d'économie d'énergie, d'émission de CO2, ...), on transforme ces objectifs en écologie punitive, guère plus efficace au demeurant.
Construire pour demain ...
Représentant 20% de la totalité des apprentis, l'apprentissage constitue dans le Bâtiment la voie privilégiée pour acquérir un métier et pour insérer durablement dans l'emploi des jeunes qui sont l'avenir de nos entreprises. [...] Sans en remettre en cause le bien fondé, la réforme doit notamment conduire à ouvrir avec pragmatisme la réflexion sur le nombre et la fréquence des formations obligatoires exigées, avec l'objectif de former moins mais mieux dans le domaine de la prévention. Pour réussir, les efforts de réforme déployés depuis plusieurs mois sur l'ensemble des sujets sociaux ne doivent pas être altérés par des mesures techniques, souvent très complexes, qui conduiraient à un alourdissement des charges pour le secteur toujours confronté à la concurrence sociale déloyale.
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