Le redressement judiciaire

À la différence de la procédure de sauvegarde, le redressement judiciaire concerne l'entreprise qui est en état de cessation des paiements (depuis moins de 45 jours). Bien que les difficultés soient donc avérées, cette procédure permet de poursuivre l'activité, maintenir des emplois et purifier le passif de l'entreprise (ce qu'elle doit). Toutefois, à ce stade, il est souvent difficile de redresser la barre, d'où l'intérêt d'agir plus tôt !
11:0028/06/2017
Rédigé par FFB Nationale
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Batiment Actualité Numéro 11 | Juin 2017

Qui peut demander le redressement judiciaire ?

Les personnes physiques exerçant une activité commerciale, artisanale, indépendante ou libérale et les personnes morales de droit privé dotées de la personnalité juridique peuvent solliciter l'ouverture de la procédure.

À la différence de la sauvegarde, les créanciers peuvent assigner le débiteur en redressement judiciaire si aucune procédure de conciliation n'est en cours.

De même, le tribunal, sur requête du ministère public, peut placer le débiteur sous redressement s'il n'y a pas de conciliation ou si le débiteur demande une sauvegarde alors que les difficultés semblent trop importantes pour l'accorder.

 

Quelles sont les conditions d'ouverture ?

Le débiteur doit être en cessation des paiements depuis moins de 45 jours.

Il existe cependant un cas - rare - d'ouverture du redressement judiciaire sans cessation des paiements : lorsqu'il y a échec de la sauvegarde et conversion de ladite procédure en redressement pour d'autres causes que la cessation des paiements.

Quelle est la procédure ?

Requête

Le représentant légal de l'entreprise en difficulté dépose une requête au greffe du tribunal, accompagnée des pièces justifiant de sa cessation des paiements.

Le tribunal peut aussi être saisi par requête du ministère public.Une enquête préalable ou des auditions avant le jugement d'ouverture sont possibles.

 

À noter

La présence du ministère public est indispensable si le débiteur a fait l'objet d'un mandat ad hoc ou d'une conciliation dans les 18 mois précédents.

Le comité d'entreprise ou les délégués du personnel sont invités à l'audience.

 

Pièces à fournir

Outre la déclaration de cessation des paiements, les pièces essentielles à fournir sont : les comptes annuels, l'état du passif exigible et de l'actif disponible, une situation de trésorerie récente, l'inventaire, le nombre de salariés, l'état des sûretés, les créances et les dettes.

 

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Le jugement d'ouverture du redressement judiciaire fait l'objet de mesures de publicité, au RCS 1, au BODACC 2 et dans un journal d'annonces légales du lieu du siège du débiteur.

L'appel du jugement est possible par le débiteur ou les autres parties concernées, dans les 10 jours de sa notification.

 

Quels sont les effets du jugement d'ouverture ?

Le jugement d'ouverture suspend les instances en cours et interdit de nouvelles poursuites individuelles de la part des créanciers.

Les dettes antérieures au jugement ne peuvent plus être payées.

Il y a arrêt du cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que des intérêts de retard et majorations, interdiction d'inscrire des privilèges, hypothèques, nantissements, gages.

Le jugement d'ouverture peut ordonner la libération du capital social non libéré par un associé ou actionnaire défaillant.

Le jugement désigne les acteurs de la procédure :

  • le juge-commissaire : chargé de veiller au déroulement régulier de la procédure, dans le respect des droits de chacun?;
  • le mandataire judiciaire : c'est l'ancien représentant des créanciers, il agit dans l'intérêt de ceux-ci, reçoit leurs déclarations de créances, consulte les créanciers sur les délais de paiement, etc.?;
  • l'administrateur judiciaire : facultatif si l'entreprise a moins de 20 salariés et réalise un chiffre d'affaires HT inférieur à 3 millions d'euros. Il assiste ou représente le débiteur dans la gestion de l'entreprise : le tribunal fixe sa mission, qui est plus étendue qu'en sauvegarde?;
  • un représentant des salariés, qui vérifie les créances issues des contrats de travail?;
  • des créanciers antérieurs peuvent être désignés contrôleurs pour assister le mandataire judiciaire ou le juge-commissaire dans leur mission de surveillance et d'administration de l'entreprise. Leur avis est requis sur le rapport de l'administrateur et les réalisations d'actifs?;
  • des comités de créanciers (deux au plus) peuvent être constitués. Ils sont obligatoires si l'entreprise a plus de 150 salariés et réalise un chiffre d'affaires de plus de 20 millions d'euros, et facultatifs en dessous. Ils représentent respectivement les établissements de crédit et les fournisseurs.Ces comités sont consultés par l'administrateur sur les demandes de délai ou de remise de dettes formulées par le débiteur. De leur côté, les comités peuvent émettre des propositions et, dorénavant, de véritables plans concurrents à celui du débiteur, pouvant aller jusqu'à prévoir l'entrée au capital d'un tiers, ce qui devra être validé par une assemblée générale ultérieure. Le tribunal veille à ce que les intérêts de tous les créanciers soient respectés?; si tel est le cas, il adopte le projet de plan finalement voté.

La procédure de redressement judiciaire peut donner lieu à l’adoption d’un plan de redressement à l’issue d’une période d’observation, pendant laquelle un bilan économique et social de l’entreprise est réalisé.

Le jugement ouvre une période d'observation

En général, elle est de six mois, renouvelable une fois pour six mois maximum (exceptionnellement, une troisième période peut intervenir).

Les différents acteurs recherchent le redressement de l'entreprise et le maintien de son activité (la cessation partielle de l'activité peut être demandée en période d'observation).S'il apparaît que les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social, l'assemblée générale est invitée à les reconstituer à concurrence du montant proposé par l'administrateur.

Si l'assemblée s'y refuse, des moyens coercitifs sont accordés au mandataire judiciaire. De même, le projet de plan peut prévoir une augmentation ou une diminution de capital. Si des licenciements économiques sont prévus dans le projet de plan, les représentants du personnel doivent être consultés sur le projet.

 

Le jugement d'ouverture fixe la date de cessation des paiements

Elle ne peut être antérieure de plus de 18 mois à la date d'ouverture de la procédure.

Cette date détermine une période dite « suspecte » au cours de laquelle les actes anormaux, tels que des paiements douteux, effectués juste avant l'ouverture de la procédure, peuvent être remis en cause. C'est le cas de la déclaration d'insaisissabilité établie moins de six mois avant l'ouverture de la procédure.

 

Le jugement précise les missions respectives de l'administrateur et du débiteur

En redressement, le débiteur n'est pas dessaisi de la gestion de l'entreprise, mais il a moins de possibilités d'agir de façon autonome qu'en sauvegarde : l'administrateur peut représenter le débiteur, ce qu'il ne peut faire en sauvegarde.

 

Que contient le jugement décidant du sort de l'entreprise ?

En premier lieu, il met fin à la période d'observation.

L'administrateur a établi l'inventaire, le bilan économique, social et environnemental. Il a recherché, avec le débiteur et les créanciers, de véritables solutions de redressement.

 

Un plan de redressement

Le projet de plan doit comporter des perspectives sérieuses et crédibles de redressement ainsi que les modalités de règlement du passif.

Si cela ne semble pas le cas, le tribunal peut inviter le débiteur à présenter ses observations sur une éventuelle liquidation non demandée. Cependant, l'apurement du passif ne doit pas être la seule motivation du plan, l'entreprise doit survivre.

Les perspectives d'emploi, les éventuelles offres d'acquisition d'une ou plusieurs activités, la consultation des créanciers sur les propositions de paiement sont expressément mentionnées.

À cette occasion, les créanciers sociaux, le Trésor public, tout comme les créanciers privés, peuvent accepter des remises de dettes ou des changements de rang de privilèges ou d'hypothèques ou abandonner des sûretés.

Le plan est soumis au tribunal pour adoption. Celle-ci peut être subordonnée au remplacement du dirigeant, si cela s'avère nécessaire (cette condition n'est pas imposée en sauvegarde).

La libération du capital non souscrit, l'augmentation ou la diminution du capital, l'arrivée de nouveaux associés peuvent être envisagées.

La cession partielle ou totale de l'activité peut être ordonnée si le débiteur ne peut se redresser lui-même.

La durée du plan ne peut excéder dix ans.

Les cautions et coobligés ne peuvent se prévaloir du plan de redressement : ils peuvent donc être poursuivis dès l'adoption du plan de redressement (contrairement au plan de sauvegarde, au cours duquel les cautions et co-obligés, personnes physiques, sont protégés).

Un commissaire à l'exécution du plan est désigné pour surveiller le bon déroulement du plan.

 

Quel est le sort des créanciers ?

Les créanciers antérieurs doivent déclarer leur créance antérieure à l'ouverture de la procédure, ainsi que les créanciers postérieurs dont la créance n'est pas née pour les besoins de la procédure, ni en contrepartie d'une prestation pendant cette période.

Les créanciers postérieurs, dont la créance est « utile » à la procédure, sont privilégiés et ont le droit d'être payés comptant.

Que deviennent les cocontractants ?

Le principe est le maintien des contrats en cours, il n'y a pas de résolution du contrat du seul fait de l'intervention du jugement d'ouverture et de l'adoption du plan.Donc les marchés en cours, les contrats avec les fournisseurs, le bail commercial... se poursuivent.

Le cocontractant doit mettre en demeure l'administrateur de statuer sur la poursuite ou non du contrat : l'administrateur judiciaire est le seul à pouvoir exiger la poursuite des contrats.

Il doit répondre dans les trente jours de la demande (lorsqu'il n'y a pas d'administrateur judiciaire, le débiteur doit prendre la décision en recueillant l'avis conforme du mandataire judiciaire).

Le défaut de réponse signifie la non-continuation du contrat et sa résiliation.

La décision de continuer le contrat emporte en contrepartie obligation de fournir la prestation promise au cocontractant, même si les prestations antérieures à l'ouverture de la procédure n'ont pas été payées par le débiteur.

 

Comment constater la réussite du plan de redressement ?

Quand les échéances du plan ont été respectées, le tribunal, saisi par requête du débiteur, du commissaire à l'exécution du plan ou de tout intéressé, constate officiellement le bon achèvement du plan. Il s'agit d'une décision gracieuse. Attention, les créanciers forclos du fait qu'ils n'avaient pas déclaré leur créance dans les délais légaux (et dont la créance n'a pas été éteinte, mais rendue inopposable pendant toute la durée du plan) peuvent éventuellement, à l'achèvement du plan, poursuivre à nouveau le débiteur.

 

Que se passe-t-il en cas d'inexécution du plan ?

En cas d'inexécution des engagements du plan, le tribunal doit être saisi de nouveau pour prononcer sa résolution et décider, le cas échéant, de la liquidation judiciaire du débiteur. Il examine la gravité de l'inexécution pour décider de la suite de la procédure. Le débiteur, les créanciers, les représentants des salariés, le commissaire à l'exécution du plan et le ministère public sont entendus au préalable par le tribunal.

Les créanciers soumis au plan résolu sont dispensés de déclarer de nouveau leur créance.

Les créanciers postérieurs bénéficient d'un privilège et doivent être payés par priorité s'ils ont porté l'impayé à la connaissance du commissaire à l'exécution du plan.La résolution du plan anéantit rétroactivement les délais et remises accordés lors de l'adoption du plan.

 

  1. Registre du commerce et des sociétés.
  2. Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales.

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