Risques du sol : avant, pendant et après les travaux, qui est responsable ?

Tout ouvrage est construit sur ou sous le sol. Pour éviter qu'ils deviennent la cause de malfaçons importantes après la réception de l'ouvrage, les risques du sol doivent être pris en compte et ce, si possible, dès l'origine du projet ou en cours d'exécution, que ce soit en marché public ou privé. Pour bien maîtriser les risques du sol et savoir dans quelles conditions réaliser les travaux, il faut tout d'abord connaître la consistance du sol. La première question qui se pose est de savoir qui doit se renseigner sur l'état du sol et du sous-sol.
11:4729/12/2011
Rédigé par FFB Nationale

Connaissance préalable de l'état du sol

 

Aucune réglementation

 

Qu'il s'agisse de marchés publics ou de marchés privés, aucune réglementation n'impose à qui que ce soit, maître d'ouvrage, maître d'œuvre ou entreprise, de recourir à une étude de sol. Une exception doit néanmoins être faite pour le secteur de la maison individuelle, où la loi impose des contraintes particulières aux constructeurs. Mais, dans tous les cas, y compris celui de la maison individuelle, il convient de noter que le maître de l'ouvrage privé ou public, dans le cadre de son obligation de renseignements, doit fournir au maître d'œuvre ou à l'entrepreneur toutes les informations qu'il possède sur l'état du sol.

 

Exemple

Les juges ont reproché à un maître d'ouvrage de ne pas avoir révélé à l'entrepreneur la présence d'un gazoduc qui passait sous le terrain. C'est au maître de l'ouvrage, lorsqu'il est professionnel, de commander directement les études de sol nécessaires et d'en assumer les charges financières.

 

Exiger une étude de sol

 

En revanche, lorsque aucune étude de sol n'a été faite au préalable par le maître de l'ouvrage, le maître d'œuvre ou les entrepreneurs ont intérêt à en exiger une, par écrit, en courrier recommandé avec accusé de réception.

 

En effet, lorsque des désordres apparaissent du fait de la nature du sol, ce sont les maîtres d'œuvre et les entrepreneurs qui voient leur responsabilité engagée.

 

Les tribunaux considèrent que le maître d'œuvre doit, lors de la conception du projet, s'assurer que celui-ci est en adéquation avec la nature du sol. Si l'architecte ne possède pas de renseignements suffisants sur la nature du sol, il doit exiger du maître de l'ouvrage une étude de sol que ce dernier réglera.

 

Faire des réserves écrites

 

De même, l'entrepreneur doit s'interroger sur l'absence de toute étude de sol et faire des réserves écrites au maître d'œuvre et/ou au maître d'ouvrage et refuser d'exécuter les travaux, en marché privé, si l'étude de sol lui semble primordiale pour pouvoir exécuter son marché sans risque de malfaçons liées à la nature du sol.

 

Les risques du sol en cours d'exécution des travaux

 

Même lorsqu'une étude de sol a été faite au préalable, il arrive qu'en cours de travaux, les entrepreneurs découvrent que le sol n'est pas conforme à l'étude. Des travaux différents ou des travaux non prévus à l'origine deviennent alors indispensables pour la bonne réalisation de l'ouvrage.

 

Qu'il s'agisse de marchés publics ou privés, la forfaitisation des prix des fondations est fortement déconseillée. Mais, en pratique, les maîtres d'ouvrage imposent très souvent des prix forfaitaires dans leurs marchés de travaux. Dans ce cas, les entrepreneurs devront prendre en charge les surcoûts dus aux aléas géologiques.

 

En marchés publics

 

"à l'exception des seules sujétions mentionnées dans le marché comme n'étant pas couvertes par les prix, ceux-ci sont réputés tenir compte de toutes les sujétions d'exécution des travaux qui sont normalement prévisibles dans les conditions de temps et de lieu où s'exécutent ces travaux, que ces sujétions résultent notamment :

  • de phénomènes naturels ;
  • de l'utilisation du domaine public et du fonctionnement des services publics ;
  • de la présence de canalisations, conduites et câbles de toute nature, ainsi que des chantiers nécessaires au déplacement ou à la transformation de ces installations ;
  • des coûts résultant de l'élimination des déchets de chantier ;
  • de la réalisation simultanée d'autres ouvrages, ou de toute autre cause. " 1

 

Il existe néanmoins pour l'entrepreneur une possibilité d'être indemnisé dans ce cas par l'application de la jurisprudence concernant les sujétions techniques imprévues.

Les sujétions techniques imprévues sont des difficultés matérielles anormales et imprévisibles au moment de la conclusion du marché et qui ont pour effet de rendre plus difficile, mais non impossible, l'exécution des prestations.

L'entrepreneur doit justifier que ces sujétions :

  • ont pour effet de bouleverser l'économie du marché,
  • ou sont imputables à un fait de l'administration.

 

En marchés privés

 

Désormais, cette théorie des sujétions imprévues peut être aussi appliquée dans les marchés privés qui ont pour document contractuel (CCAG) la norme Afnor P03-001 - édition décembre 2000 et octobre 2017.

 

En effet, "les prix du marché sont réputés tenir compte de toutes les circonstances de l'implantation, des particularités du projet et des délais et rémunèrent l'entrepreneur de tous ses débours, charges et obligations normalement prévisibles. "2

  

  1. Article 10.1.1 du CCAG-Travaux.
  2. Norme Afnor, article 9.1.2.

Cas particulier de la construction de maison individuelle CCMI

 

L'entrepreneur constructeur de maison individuelle doit, dès la signature du contrat, fixer le prix forfaitaire et définitif de la construction englobant le coût de tous les travaux indispensables à son implantation et à son utilisation1.

 

Le prix forfaitaire comprend d'une part le coût du bâtiment à construire (prix convenu) et d'autre part, s'il y a lieu, le coût des travaux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution.

Le prix convenu comprend la rémunération de tout ce qui est à la charge du constructeur et, notamment, s'il y a lieu, les frais d'études du terrain pour l'implantation du bâtiment. En d'autres termes, le constructeur de maison individuelle doit être très prudent car la loi lui demande de prévoir, dès la signature du contrat, le prix d'une étude de sol et, le plus difficile à évaluer, le surcoût qui peut éventuellement en résulter. D'après la loi, une fois le contrat signé, le prix est définitif et le constructeur ne peut pas demander un supplément de prix pour quelque raison que ce soit

La seule exception admise est le cas de nouveaux travaux demandés par le maître de l'ouvrage, mais dans ce cas ils feront l'objet d'un avenant.

 

Selon le ministre de l'Equipement et du Logement "il appartient au constructeur de vérifier la qualité du terrain lui-même et d'envisager les travaux indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble. "2

La Cour de Cassation3 a confirmé qu'il ne pouvait être prévu dans un contrat de construction de maison individuelle que le maître de l'ouvrage fournisse une étude de sol. Elle a également affirmé le principe de l'intégration du coût des travaux d'adaptation au sol dans le prix forfaitaire, sauf à respecter les formes nécessaires pour faire figurer ces travaux dans ceux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution. Ce qui signifie que ces travaux supplémentaires pouvant découler du résultat de l'étude de sol doivent être décrits et chiffrés dans la notice descriptive et ce, avant la signature du contrat. Il existe une véritable difficulté à chiffrer des travaux qui ne seront peut être pas nécessaires et qui « gonflent » le prix total de la maison.

 

En outre, même si le maître d'ouvrage accepte de payer les travaux supplémentaires dus à la nature du sol, il ne renonce pas pour autant, selon les tribunaux, au droit à remboursement qu'il a en vertu du caractère forfaitaire du prix renforcé par le caractère d'ordre public de la loi de 1990.

 

Vices du sol après la réception

 

Lorsque des malfaçons dues à la nature du sol interviennent après la réception, les responsabilités de tous les constructeurs - maîtres d'œuvre, entrepreneurs, notamment - sont engagées. "Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage".4

  1. Article L 231-2 du CCH
  2. Réponse ministérielle du 20 juillet 1992.
  3. Cour de Cassation, 3ème ch. civ., 24 octobre 2012, n°11-18164
  4. Article 1792 du code civil.

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