L’impayé est, pour l’entreprise, un incident qui peut se révéler lourd de conséquences, voire mettre son existence en péril. Quelques précautions sont donc à prendre pour l’éviter et, lorsque survient le risque de défaillance du maître de l’ouvrage, des actions peuvent être engagées.
La garantie de paiement : un rempart incontournable pour préserver sa trésorerie
Dispositif vital1, la garantie de paiement est le moyen par excellence pour éviter les impayés en cas de défaillance du maître de l’ouvrage. L’article 1799-1 du Code civil impose en effet au maître de l’ouvrage professionnel de garantir le paiement des sommes dues à l’entrepreneur lorsque le montant du marché dépasse 12 000 € HT2.
Cette garantie de paiement, que le maître de l’ouvrage doit fournir avant le commencement des travaux, permet à l’entreprise d’être payée, même si le maître de l’ouvrage est en situation de redressement ou de liquidation judiciaire.
Bien que de nombreuses entreprises soient frileuses à la demander, à l’heure où certains promoteurs donnent des signes de défaillance, la question ne peut plus être éludée.
En cas de défaillance, deux cas sont à distinguer :
- lorsque le maître de l’ouvrage recourt à un crédit spécifique, le montant du prêt est bloqué tant que l’entrepreneur n’a pas reçu le paiement de l’intégralité de la créance née du marché correspondant au prêt (article 1799-1 du Code civil, 2e alinéa). Il sera libéré soit à la suite d’un accord avec le maître de l’ouvrage, soit après une décision judiciaire ;
- lorsque le maître de l’ouvrage ne recourt pas à un crédit spécifique ou lorsqu’il y recourt partiellement, et à défaut de garantie résultant d’une stipulation particulière3, le paiement est garanti par un cautionnement solidaire consenti par « un établissement de crédit, une entreprise d’assurance ou un organisme de garantie collective4 ».
L’entreprise sera payée par la banque du maître de l’ouvrage, dès lors qu’elle apportera la double preuve écrite suivante :
- sa créance est certaine, liquide et exigible. Il s’agira, par exemple, d’une situation validée par le maître d’œuvre et non contestée par le maître de l’ouvrage, un solde devenu définitif ou une décision de justice définitive ;
- le maître de l’ouvrage est défaillant du fait du non-paiement d’une facture après mise en demeure restée sans réponse, ou du fait de sa liquidation judiciaire5.
La suspension des travaux en cas de défaut de paiement
Un défaut de paiement peut permettre à l’entreprise de suspendre l’exécution des travaux6. Entre professionnels, cette possibilité est organisée par l’article L. 124-2 du Code de la construction et de l’habitation, après mise en demeure, adressée au maître de l’ouvrage, restée infructueuse pendant 15 jours. L’entrepreneur ne sera tenu d’en reprendre l’exécution que lorsque les paiements auront apuré entièrement le passif antérieur.
Dans la norme Afnor NF P 03-0017, applicable si elle est citée comme document contractuel du marché, l’article 10.3.2.1 prévoit également cette possibilité : « En aucun cas, un entrepreneur ne peut suspendre les travaux pour défaut de paiement sans avoir prévenu par lettre recommandée le maître de l’ouvrage et le maître d’œuvre au moins quinze jours à l’avance. »
Les conséquences de l’interruption des travaux
Le maître de l’ouvrage qui n’a pas payé les sommes dues à l’entrepreneur doit supporter les conséquences du blocage dont il est la cause (le retard de livraison et le préjudice subi par l’entrepreneur : plan de charge perturbé, surcoût de la location de matériel…). Le marché n’est pas résilié, seule l’obligation de l’entrepreneur de poursuivre l’exécution des travaux est suspendue.
Le maître de l’ouvrage reste tenu par l’obligation de payer les travaux réalisés et de verser les pénalités de retard de paiement. Aucune pénalité de retard ne peut être appliquée à l’entrepreneur.