Rénovation des bétons anciens : un marché d'avenir

En développement continu depuis le xixe siècle, les constructions en béton armé exigent de plus en plus de travaux de restauration. Avec le guide technique Les Bétons du patrimoine, édité à l’initiative du Groupement des entreprises de restauration des monuments historiques (GMH-FFB), et le lancement fin 2021 de deux nouvelles qualifications Qualibat, les entreprises de maçonnerie disposent aujourd’hui d’outils nouveaux pour se positionner sur ce marché porteur.
13:5924/03/2022
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Bâtimétiers Numéro 66 | Mars 2022

Si les premiers bétons remontent à l’Antiquité romaine, il a fallu attendre le XIXe et surtout le XXe siècle pour voir les bétons armés se développer et marquer durablement l’histoire de l’architecture. En ce début de XXIe siècle, la France compterait au moins 950 édifices en béton classés monuments historiques, auxquels il faut ajouter un très grand nombre de constructions en béton – halles, églises, maisons individuelles… – qui sont simplement labellisées pour leur intérêt architectural. En raison d’une formulation longtemps aléatoire des bétons, beaucoup moins scientifique qu’elle peut l’être de nos jours, un grand nombre de ces édifices souffrent aujourd’hui de pathologies diverses – mousses, salissures, fissures ou éclats – qui exigent des travaux de restauration. Dans ce contexte, le Groupement des entreprises de restauration des monuments historiques (GMH-FFB), le syndicat professionnel qui réunit les entreprises spécialisées dans la restauration du patrimoine bâti, a pris l’initiative d’élaborer un guide technique, Les Bétons du patrimoine, édité au printemps 2021, qui s’adresse aux maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre et entreprises positionnés sur ce marché (voir encadré). « Jusqu’à présent, la restauration des bétons anciens était surtout fondée sur les retours d’expérience », commente Bernard Quénée, directeur scientifique du Laboratoire d’études et de recherche sur les matériaux (Setec-Lerm), qui a dirigé ce travail collectif. « Avec ce guide, explique-t-il, nous avons élaboré un ouvrage méthodologique et pratique, répondant aux nombreuses questions qui se posent lors de la restauration d’un édifice en béton. »

 

 

Jusqu’à présent, la restauration des bétons anciens était surtout fondée sur les retours d’expérience.

Bernard Quénée, directeur scientifique du Laboratoire d’études et de recherche sur les matériaux (Setec-Lerm).

Histoire, diagnostic et restauration

 

Destiné à donner aux acteurs de la restauration des édifices en béton une culture générale sur ce sujet, ainsi que la marche à suivre pour mener une telle opération avec succès, cet ouvrage rappelle quel est le principe du béton, et donne une histoire résumée des grandes dates de ce matériau, illustrée par de nombreux exemples d’édifices représentatifs. Il consacre également un important chapitre aux pathologies du béton armé, depuis les défauts de surface jusqu’aux différents types de fissures, liées aux matériaux ou à la structure, pour permettre aux intervenants d’un chantier de bien les identifier. Autre étape tout aussi essentielle, il traite du diagnostic technique, qui doit être réalisé par un bureau d’études et/ou un laboratoire sous le pilotage du maître d’œuvre. Enfin, la partie la plus importante du guide est consacrée à l’exécution des travaux de restauration. Elle passe en revue les méthodes traditionnelles, les méthodes électrochimiques et les renforcements structurels, le tout complété par une annexe qui répertorie les différentes méthodes de relevé d’auscultation et d’analyse en laboratoire. « En définitive, cet ouvrage couvre l’ensemble de l’état de l’art sur les techniques existantes, y compris les plus récentes, avec leurs avantages, inconvénients et limites, pour que les acteurs de la restauration puissent faire des choix éclairés, soit en reconstituant des bétons qui étaient utilisés il y a cinquante ou cent ans, soit en optant pour une solution alternative dans l’intérêt de l’édifice à restaurer », résume Bernard Quénée.

 

La qualification, un outil pour faire reconnaître un savoir-faire spécifique

Antoine Bourdon, responsable du Développement de Pierrenoël à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)
Créée en 1844, spécialisée en taille de pierre, maçonnerie traditionnelle, enduits traditionnels et restauration des bétons anciens, Pierrenoël est l’une des trois premières entreprises à avoir obtenu les qualifications Qualibat 2182 (restauration des ouvrages du patrimoine en béton) et 2193 (restauration des édifices en béton classés monuments historiques). « Jusqu’à présent, nous répondions aux marchés de rénovation des bétons anciens en mettant en avant nos références et en justifiant l’emploi de certains procédés et méthodologies particulières, explique Antoine Bourdon.
La qualification Qualibat est une étape stratégique qui va faciliter la reconnaissance de nos compétences et de notre expérience auprès des maîtres d’œuvre. » Spécialisée dans les bétons Perret, du nom de l’architecte qui marqua l’histoire du béton armé pendant la première moitié du xxe siècle, l’entreprise a pour références des rénovations prestigieuses comme celles du palais d’Iéna et du siège du Mobilier national à Paris. Elle estime que ces qualifications arrivent au moment idéal pour répondre à des besoins de rénovation de bétons anciens qui seront grandissants dans les années à venir.

Deux qualifications Qualibat pour les bétons anciens

 

Acteur majeur au service de la qualité dans le bâtiment, Qualibat apporte sa pierre à l’édifice avec deux nouvelles qualifications – la 2182, pour la restauration des ouvrages du patrimoine en béton, et la 2193, pour les édifices en béton classés monuments historiques – qui ont été attribuées à trois premières entreprises à la fin 2021. « En 2018, les maîtres d’ouvrage et architectes de la commission Monuments historiques de Qualibat ont alerté sur le fait qu’ils avaient des difficultés pour trouver des entreprises aptes à la restauration des édifices anciens en béton, explique Frédéric Cacaut, responsable du service Étanchéité et Monuments historiques de Qualibat. D’autre part, la qualité de certaines restaurations, souvent effectuées par tâtonnement, se révélait insuffisante. »

 

À l’issue de trois années de travaux, un groupe de travail comprenant notamment la Mairie de Paris et le Laboratoire de recherche sur les monuments historiques (LRMH) a abouti à ces deux qualifications. Dans ce cadre, les entreprises candidates doivent attester de leurs compétences internes en matière de béton ancien, et de leur aptitude à travailler avec un bureau d’études ou un laboratoire extérieur, et faire état d’une opération de rénovation réussie avec un retour d’expérience de cinq ans.

 

À condition de se former ou de recruter des salariés expérimentés, les entreprises de maçonnerie qui ont une sensibilité pour le bâti ancien ont désormais les outils nécessaires pour se positionner sur le marché de la rénovation des édifices en béton.

Un ouvrage validé par le LRMH

Le guide technique Les Bétons du patrimoine a été réalisé à l’initiative du GMH-FFB, dans le cadre du Programme recherche développement métiers (PRDM) de la FFB.

Il est issu du travail collectif d’une équipe pluridisciplinaire réunissant un architecte du patrimoine, une historienne, un bureau d’études, des laboratoires, des entreprises de restauration et des industriels, sous la supervision de Bernard Quénée (directeur scientifique du Setec-Lerm), afin de donner une vision panoramique complète du matériau béton. Il a été validé par le Laboratoire de recherche sur les monuments historiques (LRMH), qui fait autorité en matière de rénovation des édifices anciens.

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