Instruction des demandes de permis - présenter un dossier irréprochable devient la règle !

Si vous déposez un permis de construire avec une petite erreur (une non-conformité à une règle d’urbanisme), l’Administration peut purement et simplement le refuser, au lieu de l’accepter avec prescriptions. C’est ce qu’estime le Conseil d’État, dans un avis regrettable donné en avril 2025 1.
15:0921/05/2025
Rédigé par FFB Nationale
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Batiment Actualité Numéro 9 | mai 2025

Dans un avis rendu le 11 avril dernier, le Conseil d’État affirme que, lorsqu’un projet méconnaît une règle d’urbanisme, même de façon minime, le service instructeur n’est pas tenu de délivrer l’autorisation assortie de prescriptions, il peut légitimement choisir de refuser la demande.

 

Cette approche trop stricte impose aux porteurs de projet de présenter un dossier irréprochable… sans pouvoir compter sur la bienveillance de l’Administration pour rectifier le tir par le biais de prescriptions.

 

Le cadre juridique permettant de la souplesse…

 

Les services instructeurs des demandes de permis sont chargés de s’assurer de la conformité aux règles d’urbanisme des projets qui leur sont soumis 2.

 

Dans ce cadre, le pétitionnaire peut modifier sa demande, de sa propre initiative ou après que l’Administration l’a invité à le faire, pourvu que la nature du projet initial ne soit pas changée 3.

 

Lorsqu’un projet ne respecte pas totalement les règles applicables, l’Administration peut l’autoriser en imposant dans l’arrêté de permis des prescriptions spéciales.

 

Les prescriptions doivent porter sur des points précis et limités et avoir pour effet d’assurer la conformité du projet aux règles d’urbanisme 4.

 

… il était légitime d’espérer une plus grande simplification

 

Dans un souci de simplification administrative, il était légitime de se demander si les services instructeurs ne devaient pas, lorsque cela était possible, privilégier l’octroi d’une autorisation avec prescriptions plutôt qu’un refus.

 

Le Conseil d’État en a décidé autrement en adoptant une position rigide et intransigeante

Depuis 2019 5, le Conseil d’État imposait à l’Administration, avant de refuser un projet susceptible de nuire à la salubrité ou à la sécurité publique, d’examiner s’il était possible de l’autoriser en l’assortissant de prescriptions.

 

Cela permettait de « régulariser » le permis de construire et offrait une souplesse bienvenue.

 

Cette position s’appuyait sur une lecture favorable aux porteurs de projet de l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme, qui prévoit la possibilité d’édicter des prescriptions.

 

L’objectif du Conseil d’État était jusqu’alors de contraindre l’Administration à privilégier les autorisations avec prescriptions plutôt que les refus catégoriques qui engendrent des pertes de temps pour les porteurs de projet.

 

Saisi d’un recours contre un refus de permis de construire, le tribunal administratif de Toulon a demandé au Conseil d’État de préciser l’étendue de cette obligation.

 

Dans sa réponse, celui-ci vient poser une règle redoutable pour les porteurs de projet : peu importe qu’un texte prévoie la possibilité d’édicter des prescriptions spéciales, l’Administration en a toujours la possibilité, sans jamais y être tenue.

 

Le Conseil d’État exclut la possibilité d’obtenir du juge l’annulation d’un refus et une injonction faite à l’Administration d’édicter des prescriptions : lorsque cette dernière choisit de ne pas user de cette faculté, le juge ne peut s’y substituer.

 

Cette position risque d’encourager et de légitimer les pratiques abusives de certains services instructeurs, enclins à multiplier les refus sans justification solide.

 

Qu’en pense la FFB ?

 

La FFB déplore cette décision, qui fait peser une insécurité juridique sur les porteurs de projet.

 

En permettant d’ériger la moindre non-conformité en motif de refus, elle les contraint à une exigence de perfection des projets sans laisser place à la moindre marge d’ajustement.

 

Pire encore, cette position risque d’encourager et de légitimer les pratiques abusives de certains services instructeurs, enclins à multiplier les refus sans justification solide, au lieu d’accompagner les projets par des prescriptions correctrices.

 

Dans ce contexte, il peut être particulièrement pertinent et prudent d’avoir un échange avec les services instructeurs préalablement au dépôt du permis de construire.

  1. CE, sect., 11 avril 2025, société AEI Promotion, n° 498803.
  2. Article L. 421-6 du Code de l’urbanisme.
  3. CE, 1er décembre 2023, commune de Gorbio, n° 448905.
  4. CE, sect., 13 mars 2015, Ciaudo, n° 358677.
  5. CE, 26 juin 2019, commune de Tanneron, n° 412429.

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