Ce que dit la loi
La loi prévoit que la garantie décennale est due par tout constructeur d’un ouvrage. Cela suppose des travaux d’une certaine ampleur, notamment en cas d’intervention sur un bâtiment existant.
Dès lors, l’entreprise qui se limite à adjoindre un élément d’équipement à un ouvrage existant ne devrait logiquement pas être redevable de la garantie décennale. C’est ainsi que se positionnait la Cour de cassation en 2017.
En 2017, un revirement de jurisprudence
Or, depuis l’arrêt du 15 juin 2017, la Cour de cassation a procédé à un revirement de jurisprudence : après le dysfonctionnement d’une pompe à chaleur installée dans une maison, les propriétaires ont exercé un recours contre l’installateur. Dans cette affaire, les juges ont affirmé que « les désordres affectant des éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ».
Le 26 octobre de la même année, ils sont allés plus loin en retenant que la décennale due par l’installateur s’étendait à l’ensemble des dommages causés à l’existant (et non seulement aux dommages subis par l’équipement). Le champ de la décennale se retrouvait donc très largement étendu.
Justification de la position prise à l’époque
La Cour de cassation justifie sa position de l’époque par la nécessité de clarifier le droit applicable (en ne distinguant plus les garanties applicables selon que l’élément d’équipement était d’origine ou seulement adjoint à l’existant) et par une volonté d’assurer une meilleure protection des maîtres d’ouvrage.
Mais ces évolutions n’étaient pas sans conséquences pour les professionnels du bâtiment.
Outre le fait – déjà très contestable – que des entreprises pouvaient se retrouver débitrices de la garantie décennale dans un cadre non prévu par les textes, cette solution revenait à mettre en place une décennale, que certains ont pu qualifier de « rechargeable », à chaque installation d’un équipement (pour peu que le sinistre trouve sa source dans cet élément).
En 2024, la Cour de cassation évalue la pertinence de sa position
Les nombreuses critiques formulées à l’encontre de cette solution ont conduit la Cour de cassation à s’interroger sur la pertinence de sa jurisprudence. C’est ce qu’elle a fait dans une affaire tranchée le 21 mars dernier.
Une entreprise avait procédé à l’installation d’un insert de cheminée dans une maison. Un incendie est survenu, occasionnant la destruction de l’habitation et de l’intégralité des meubles et effets qui s’y trouvaient.
Les juges se sont de nouveau interrogés sur les garanties applicables dans ce contexte. Les dommages devaient-ils (conformément à la solution de la Cour de cassation applicable depuis 2017) être pris en charge au titre de la décennale ou était-il préférable de réorienter la jurisprudence ?
La FFB consultée et entendue