Quel cadre juridique ?
En marchés privés, les règles relatives à la retenue de garantie sont fixées par la loi du 16 juillet 19711, qui est d’ordre public. Cela signifie qu’il est impossible de prévoir contractuellement des dispositions qui dérogent à cette loi.
En marchés publics, la retenue de garantie est régie par le Code de la commande publique2. Ces dispositions sont également impératives.
Attention : les dispositions relatives aux marchés publics sur la retenue de garantie ne s’appliquent ni aux contrats de sous-traitance, ni aux marchés des acheteurs privés de la commande publique (ESH, SPL, SEM, entreprises publiques), qui restent régis par la loi du 16 juillet 1971.
La retenue de garantie est-elle obligatoire ?
En marchés publics comme en marchés privés, la retenue de garantie n’est pas obligatoire. Elle doit être prévue au contrat. Elle ne s’appliquera donc que si elle est effectivement prévue au contrat.
En marchés privés, l’article 1er de la loi du 16 juillet 1971 prévoit que « les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l’article 1779-3° du Code civil peuvent être amputés d’une retenue égale au plus à 5 % de leur montant et garantissant contractuellement l’exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l’ouvrage ».
En marchés publics, le Code de la commande publique indique que « lorsque le marché prévoit une retenue de garantie, celle-ci est remboursée dans un délai de trente jours à compter de la date d’expiration du délai de garantie3 ». Ainsi, si rien n’est prévu au contrat, le maître d’ouvrage ne peut imposer à l’entreprise une retenue de garantie.
Quel est l’objet de la retenue de garantie ?
En marchés privés, la retenue de garantie a pour seul objet de couvrir le maître d’ouvrage en cas de défaillance de l’entreprise dans la levée des réserves à la réception. Ainsi, seules les réserves inscrites sur le procès-verbal de réception (ci-après, PV de réception) sont concernées par la retenue de garantie. Celle-ci ne couvre donc pas l’abandon de chantier, les pénalités de retard ou encore les désordres signalés pendant le délai de garantie de parfait achèvement.
En marchés publics, l’objet de la retenue de garantie est plus large qu’en marchés privés. En effet, ici elle sert non seulement à couvrir les réserves mentionnées sur le PV de réception, mais également les désordres signalés pendant le délai de garantie de parfait achèvement, qui est d’un an à compter de la réception des travaux.
Attention : le maître d’ouvrage public peut décider de prolonger le délai de garantie de parfait achèvement, si les réserves signalées n’ont pas été levées pendant le délai d’un an.
Cette faculté est prévue par l’article 44 du CCAG-Travaux, qui prévoit que « si, à l’expiration du délai de garantie, le titulaire n’a pas procédé à l’exécution des travaux et prestations énoncés à l’article 44.1 ainsi qu’à l’exécution de ceux qui sont exigés, le cas échéant, en application de l’article 39, le délai de garantie peut être prolongé par décision du maître d’ouvrage jusqu’à l’exécution complète des travaux et prestations, que celle-ci soit assurée par le titulaire ou qu’elle le soit d’office conformément aux stipulations de l’article 41.6 ».
Quel est le montant de la retenue de garantie ?
En marchés privés, le montant de la retenue de garantie ne peut excéder 5 % du montant du marché. Toute clause contractuelle prévoyant un montant supérieur est considérée comme nulle. De plus, le marché ne peut prévoir une autre retenue ayant le même objet que la retenue de garantie, afin d’éviter de contourner le seuil légal imposé.
En marchés publics, le montant de la retenue de garantie est également fixé à 5 % du montant du marché.
Toutefois, lorsque le titulaire du marché public est une petite ou moyenne entreprise (PME) mentionnée à l’article R. 2151-13, le taux de la retenue de garantie ne peut excéder 3 % pour les marchés publics passés par :
- l’État ;
- les établissements publics administratifs de l’État (hors établissements publics de santé) ayant des charges de fonctionnement supérieures à 60 millions d’euros dans l’avant-dernier exercice ;
- les collectivités territoriales, leurs établissements publics et groupements ayant des dépenses de fonctionnement supérieures à 60 millions d’euros dans l’avant-dernier exercice.
À noter : les entreprises peuvent vérifier si leur maître d’ouvrage est concerné en consultant le budget sur le site du ministère de l’Économie et des Finances : https://www.economie.gouv.fr/cedef/chiffrescles-budgets-collectivites-locales.
Par quoi l’entreprise peut-elle remplacer la retenue de garantie ?
En principe, en marchés privés et publics, la retenue de garantie est prélevée par fractions sur les acomptes, les règlements partiels définitifs et le solde.
Toutefois, l’entreprise peut décider de remplacer la retenue par une caution bancaire, afin de ne pas grever sa trésorerie. Sur ce point encore, des différences existent selon la nature du marché.
En marchés privés, la retenue de garantie peut être remplacée, au gré de l’entreprise, par une caution personnelle et solidaire à tout moment4.
Ainsi, le maître d’ouvrage ne peut imposer à l’entreprise un autre type de caution, comme la garantie à première demande, et ne peut également lui imposer de fournir cette caution à une date déterminée. L’entreprise est libre de choisir la date à laquelle elle fournit la caution.
Ainsi, si elle décide de la fournir en cours d’exécution pour l’ensemble du marché, le maître d’ouvrage devra lui restituer les sommes prélevées sur les situations antérieures.
Attention : lorsque la retenue de garantie n’est pas cautionnée, le maître d’ouvrage doit consigner les sommes prélevées auprès d’un tiers accepté par les deux parties ou, à défaut, désigné par le président du tribunal judiciaire ou du tribunal de commerce selon que le marché est conclu avec un maître d’ouvrage particulier ou professionnel.
Le maître d’ouvrage ne peut garder les sommes. La consignation constitue une garantie pour l’entreprise, lui assurant la restitution des sommes à l’expiration du délai de parfait achèvement. L’entreprise ne doit pas hésiter à rappeler au maître d’ouvrage son obligation de consigner les sommes retenues.