Béton bas carbone : maître d'ouvrage, entreprise et fournisseur en synergies

Réalisé à 100 % en béton bas carbone, le programme de logements Interface, actuellement en construction à Lyon, montre que ce matériau peut ne pas impacter la conception des ouvrages et faire l’objet d’une mise en œuvre en tous points semblable à celle d’un béton classique. Son utilisation tient cependant à une volonté de RSE commune de la part des parties prenantes, ne serait-ce que pour intégrer le surcoût lié à ce matériau innovant dans l’économie du projet.
12:4515/09/2022
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Bâtimétiers Numéro 68 | Septembre 2022

Les résidents du programme Interface, qui prendront possession de leur logement courant 2023, auront la satisfaction d’avoir participé, même modestement, à la lutte contre le réchauffement climatique et pour la préservation de la planète. En cours de construction dans le VIIIe arrondissement de Lyon, ce programme est en effet le premier projet d’ampleur réalisé à 100 % en béton bas carbone de la région Auvergne-Rhône-Alpes (AURA). Il s’agit d’un îlot urbain composé de sept bâtiments dissociés, de R + 6 à R + 10, comportant 161 logements et sept locaux commerciaux, pour lequel seront coulés au total 11 000 m3 de béton bas carbone. Sa construction a été attribuée, à l’issue d’un appel d’offres en lots séparés, au groupe lyonnais Mazaud, une entreprise familiale de maçonnerie et gros œuvre, également entreprise générale tous corps d’état, implantée à Villeurbanne (Rhône), où elle emploie 130 salariés. « Notre entreprise se caractérise par sa volonté de construire de façon durable, en associant matériaux bas carbone et éco-matériaux, un engagement qui date de plusieurs années, déclare sa présidente, Cécile Mazaud. Pour ce qui est du programme Interface, la décision de construire en béton bas carbone a été prise en concertation avec le maître d’ouvrage, Nexity, qui partage avec nous les mêmes objectifs de RSE et avec qui nous avons noué un partenariat de confiance depuis de longues années. »

 

Notre entreprise se caractérise par sa volonté de construire de façon durable, en associant matériaux bas carbone et éco-matériaux, un engagement qui date de plusieurs années. 

Cécile Mazaud, présidente du groupe éponyme, à Villeurbanne (Rhône).
© Ecolapse

Le programme Interface en faits et chiffres

  • 7 bâtiments de R + 6 à R + 10
  • 161 logements et 7 locaux commerciaux
  • 25 600 m2 de planchers
  • 11 000 m3 de béton bas carbone
  • Maître d’ouvrage : Nexity
  • Entreprise de construction : groupe Mazaud
  • Livraison : deuxième semestre 2023

Conception et mise en œuvre inchangées

 

Après l’achèvement du gros œuvre des trois premiers bâtiments, et après avoir construit la moitié des trois suivants, le choix du béton bas carbone se révèle tout à fait satisfaisant :
« À plus de la moitié du chantier, nous ne voyons aucune différence avec un béton classique, constate Romain Arcelli, responsable des travaux gros œuvre du groupe. Ce choix n’a eu aucune incidence sur la conception des ouvrages, ni sur la mise en œuvre. En ce qui concerne notre chantier, il n’y a aucun rallongement du temps de prise, même par temps froid. » C’est tout juste si le responsable technique concède que ce béton est « un peu plus collant » que le matériau coulé habituellement, une différence négligeable au regard du gain qu’il apporte au plan environnemental, puisque le béton bas carbone mis en œuvre a une empreinte carbone inférieure de 50 % environ par rapport au béton le plus défavorable auquel il se substitue.

Conforme à la norme béton NF EN 206/CN, le béton bas carbone mis en œuvre pour le programme Interface se compose notamment d’un ciment classé CEM III/A, dans lequel une partie du clinker, le composant le plus pénalisant pour l’empreinte carbone, a été remplacée par des matériaux alternatifs (voir encadré). Sans la moindre incidence sur les propriétés mécaniques du matériau : « En fonction des parties de l’ouvrage, nous avons mis en œuvre une majorité de béton de classe C30/37, mais aussi du C25/30 et une petite partie en C35/45, précise Romain Arcelli. Quelle que soit la classe de résistance, les performances sont identiques à celles d’un béton classique. » D’autre part, la démarche d’économie circulaire a été prise en compte par l’intégration de 30 % de granulats recyclés. Le chantier a également permis de tester des bétons « très bas carbone », dont l’empreinte carbone est inférieure de 90 % à celle d’un béton classique. Mais des progrès doivent encore être accomplis pour que cette nouvelle génération de bétons puisse répondre, seuls ou associés à d’autres matériaux, aux exigences de plus en plus élevées de la RE 2020.

 

Béton bas carbone : une plaquette pour y voir plus clair

Matériaux innovants, les bétons bas carbone sont des bétons qui, pour des propriétés, des performances, des qualités d’usage et une durabilité équivalentes, émettent moins de gaz à effet de serre que des bétons classiques. Cependant, le terme « bas carbone », s’il est largement répandu, ne correspond pas à une définition officielle qui s’appuie sur un cadre normatif ou réglementaire.

 

Pour mieux savoir de quoi on parle, le Syndicat national du béton prêt à l’emploi (SNBPE) a pris l’initiative d’éditer en avril 2021 une plaquette sobrement intitulée « Béton bas carbone, définition ». « L’intérêt majeur de ce document est de définir des seuils à partir desquels les bétons peuvent être qualifiés de “bas carbone”, en fonction des classes d’exposition et de la classe de résistance du béton, précise Jean-Marc Potier, chargé de mission technique au SNBPE. Il a pour fonction d’éclairer les maîtres d’ouvrage, les fournisseurs de béton et les entreprises dans la définition de la bonne formulation. » Par exemple, la plaquette indique qu’un béton de classe de résistance C25/30 et de classe d’exposition XC3-XC4-XF1 peut être appelé « bas carbone » s’il émet moins de 195 kgeqCO2/m3, alors qu’un béton classique équivalent en émet entre 210 et 240. Les bétons bas carbone sont obtenus, entre autres, par substitution du clinker contenu dans le ciment par des matériaux moins émissifs. Ils sont cependant conformes à la norme NF EN 206/CN et peuvent donc être mis en œuvre de façon traditionnelle. Il est recommandé de prendre quelques précautions relatives à la résistance au jeune âge et au temps de décoffrage, en fonction des conditions climatiques.

Un choix qui doit faire consensus

 

Selon les bâtiments qui le composent, l’îlot Interface présentera différents types de façades – enduit, lasuré, matricé – qui montrent que le béton bas carbone se prête à tous les types de finition. Pour réaliser certaines façades en béton brut, l’entreprise a mis en œuvre du béton bas carbone autoplaçant qui, une fois décoffré, fournit un parement parfait, avec une teinte plus claire que le béton conventionnel. Une fois toutes les réserves levées sur le plan technique, il apparaît que ce choix constructif est le résultat d’un engagement commun des parties prenantes du projet : « L’utilisation d’un béton bas carbone a été rendue possible grâce à un partenariat constructif entre le maître d’ouvrage, l’entreprise et le fournisseur, conclut Bertrand Delahousse, directeur général du groupe Mazaud. Pour le projet Interface, cette volonté commune d’aboutir s’est traduite par une négociation sur le prix du béton bas carbone, un matériau innovant et donc logiquement plus cher, pour réduire le différentiel avec le béton classique et parvenir à un coût de construction global acceptable. » Avec sa surface de plancher de 25 600 m2, le programme Interface montre qu’il est désormais possible, techniquement et économiquement, de réaliser des grands projets à 100 % en béton bas carbone.

 

L’utilisation d’un béton bas carbone a été rendue possible grâce à un partenariat constructif entre le maître d’ouvrage, l’entreprise et le fournisseur. 

Bertrand Delahousse, directeur général du groupe Mazaud.

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